Terry Deroover : « Se donner à fond à chaque instant, pendant 4 ans ! »

Qui est Terry Deroover ?

« Je suis meneur de jeu pour Leuven Bears depuis 3 ans. J’ai commencé le basket à l’âge de 4 ans, toujours dans le même club, avant de rejoindre le centre de formation. J’ai rejoint le centre à 14 ans et j’y suis resté quatre années. Puis, j’ai fait deux ans en division 2 nationale et finalement j’ai atterri en division 1. »

Quelles étaient tes motivations pour rentrer au centre de formation ?

« Mes motivations ? Je pense qu’elles sont assez simples : c’était de devenir le meilleur possible ! Et je pense qu’en Wallonie, c’était le seul endroit où c’était possible de le devenir. Lors des sélections provinciales nous nous étions dit, avec d’autres joueurs, « pourquoi ne pas y aller tous ensemble ? ». Au final, une majorité des sélectionnés sont rentrés au Centre de Formation.  Je pense que c’est l’un des meilleurs endroits pour progresser car on joue contre les meilleurs, on a une charge d’entrainement incomparable et on est suivi par des coachs, des assistants coachs, des kinés, des médecins, des préparateurs physiques… Donc voilà, je pense que c’est clair ! »

Le centre de formation t’a-t-il préparé à devenir un joueur de haut niveau ?

« Oui, parce que dans un club, on n’a pas tout cet encadrement autour de nous. On a beaucoup d’influence de personnes qui ne connaissent pas le haut niveau, qui connaissent le basket via leurs enfants, via la famille… Au centre, non ! Nous sommes encadrés par des gens qui sont concernés par le basket de haut niveau et qui font tout pour que nous,  les joueurs, puissions atteindre le sport de haut niveau. Au centre, on a vraiment tout cet enseignement sur comment devenir un sportif de haut niveau. Comment adapter sa vie ? Comment adapter son rythme ? Que manger ? Comment aborder un match ? Même l’aspect psychologique est abordé… Je pense qu’en sortant du centre on a cette mentalité de dire : «  je suis un sportif de haut niveau. »

Comment as-tu géré l’aspect scolaire et la charge d’entrainement au centre ?

« Je n’ai pas eu trop de difficultés mais il ne faut pas se perdre. Il ne faut pas oublier qu’on est au centre pour s’entrainer le plus possible, on doit donc gagner du temps. Il y a le temps libre, donc au début on profite évidemment. On est plus avec ses parents, on a un peu de liberté donc on essaye, on fait un peu ce qu’on a envie de faire mais c’est là où est l’erreur je pense. Si on a choisi d’être au centre de formation, c’est pour avoir une charge d’entrainement maximale et pouvoir progresser le plus vite possible. Les études s’incorporent là-dedans, c’est aussi important et je pense qu’il faut faire tout, de manière organisée, le plus vite possible. Il faut choisir, soit on le fait avant l’entrainement, soit après l’entrainement. Dans mon cas, la journée type c’était : retour de l’école, le goûter et puis on allait s’entrainer. Après, on allait manger et puis directement avec deux trois joueurs, on allait shooter pendant une heure, une heure et demie mais c’était un choix. On savait qu’en remontant, on allait devoir travailler mais ce n’est pas là qu’on doit se dire : « ah non, je suis fatigué, j’ai été m’entrainer, j’étudie plus, je ne travaille plus… ». Certains n’étudiaient pas et ça amène des problèmes. On a des problèmes à l’école, on perd un an, c’est une année de perdue et ce n’est pas ce qu’on veut. On veut progresser le plus vite possible, sortir et être un sportif de haut niveau. Je pense qu’il faut faire des efforts, on est là pour travailler. Il n’y a rien à faire, si on veut progresser, il faut passer par là. Si on ne travaille pas de manière organisée, on ne peut pas gagner du temps pour s’entrainer encore plus. Il est possible de s’entrainer énormément et réussir à l’école, tout est une affaire d’organisation…Pierre Antoine Gillet et moi en sont l’exemple… »

Tu as d’ailleurs continué tes études après le centre, pourquoi ?

« J’ai voulu continuer car en Belgique, beaucoup de joueurs ont essayé et n’ont pas réussi. On ne sait jamais le dire avant car il y a toujours un facteur chance qui intervient par rapport à notre réussite donc j’essaye de m’assurer un avenir sans basket. Lors de ma première année en division 2 à Carnières, j’ai peut-être visé un peu trop haut en essayant de combiner des études d’ingénieur de gestion et du basket de haut niveau. Cette année-là, je m’entrainais deux fois par jour et même si je n’ai pas raté de beaucoup, je me suis rendu compte que la charge était trop lourde. J’étais très fatigué, même mentalement… Après une année sabbatique de réflexion, je me suis orienté vers le marketing qui restait un peu dans la lignée de ce que j’avais fait. Ça m’apporte autre chose que le basket, j’ai une autre vision sur le monde et je reste connecté avec ce qu’il se passe. Il est important d’avoir d’autres hobbys, d’autres passions et moi ce qui m’occupe pour l’instant ce sont mes études et ça me sort un peu du monde du basket. Ça m’aide beaucoup, ça me sort de ma bulle. Ça m’aide également dans le monde de tous les jours. Mon but est de continuer à jouer en division 1 mais je sais qu’un jour ça va m’aider… Et j’ai une sécurité en cas de blessure !

Toi qui es sportif de haut niveau, quels conseils donnerais-tu aux jeunes ?

« Je m’adresse surtout aux jeunes du Centre de Formation… Le premier conseil que je leur donnerais c’est de se donner à fond dans tout ce qu’on fait. 4 ans, ça passe très vite ! On a à peine commencé que c’est déjà fini ! Ces 4 années sont super importantes et peuvent faire la différence. Il y a beaucoup de joueurs très doués à l’âge de 13 ans et qui n’ont pas utilisé tout leur potentiel… Ce sont vraiment les années 14-18 qui vont déterminer le reste de votre vie de basketteur. Vous êtes à l’internat, vous avez choisi le basket pour votre vie. Donnez-vous à fond dans tout ce que vous faites ! Même les jours où tu es un peu fatigué, même s’il y a des jours où tu es un peu affecté par des choses extérieures au basket, tu dois te forcer, tu dois oublier.  Quand tu rentres sur le terrain, donne-toi à fond dans tout ce que tu fais.

Le deuxième conseil c’est de faire les petits extras, il y a toujours des petites choses que l’on peut travailler. Un coach, sur une année, ne peut pas travailler tous vos aspects de votre jeu propre à vous. Il doit travailler une équipe, donc il y a des petits plus à faire. Concrètement, cela veut dire arriver 30 minutes avant l’entrainement et partir 30 minutes après l’entrainement pour travailler votre dribble, vos passes, votre shoot, votre physique… N’oubliez jamais, si vous vous entrainez de la même manière qu’un autre, vous n’avez pas de petit bonus par rapport à lui. Cherchez les bonus à fond, tout le temps, et tout faire à fond ! »

As-tu toujours des contacts avec les (anciens-anciennes) ?

« Oui, un petit peu par Facebook. On suit un petit peu la vie de tout le monde… Mais la vie fait que nos chemins se sont séparés et qu’on ne sait pas garder contact avec tout le monde. Maintenant, c’est plus facile avec ceux qui jouent au haut niveau comme Loïc Schwartz, Pierre-Antoine Gillet ou Amaury Gorgemans car on se voit déjà plus souvent. Même du côté féminin, les filles qui sont au top on les suit via les stats, on s’envoie un petit message de temps en temps… J’ai également des contacts avec Nicolas Sturam, un de mes meilleurs amis mais là, c’est différent. On ne sait pas être amis avec tout le monde… Mais on ne va pas au centre pour se faire des amis, même si on est content de se revoir car on a plein de souvenirs ensemble… Maintenant voilà, les vies se séparent et on doit faire avec. »

Quel est ton souvenir le plus cocasse au centre de formation ?

« Lors de mon premier match avec le centre de formation, j’étais évidemment stressé. De plus, c’était le premier match de l’équipe garçons donc énormément de gens étaient venus voir, mes parents, ma famille… Je me souviens que je prends un rebond défensif et je remonte le terrain en faisant passer la balle entre mes jambes, j’arrive à l’anneau et je veux faire une passe dans le dos… Finalement la balle sort. Julien Marnegrave, qui était le coach, terrifiait tout l’équipe à l’époque. Il prend temps mort… Je n’ai pas eu le temps de m’asseoir qu’il est venu me parler à 10cm en me criant dessus ! Il m’a demandé « qu’est-ce que tu as fait ? Tu crois qu’on est à Bouglione ? » … Je m’en souviens comme si c’était hier. Je me sentais ridicule ! Le coach avait pris temps mort, uniquement pour m’engueuler ! A la fin  du temps mort, je pensais que j’allais descendre et puis, non, le coach m’a pris par l’épaule et m’a dit « allez, vas-y, fonce ! ». C’est typique d’un coach comme ça, il va vous engueuler vous montrer ce que vous avez fait de mal mais va toujours garder confiance en vous ! Dans le sport de haut niveau il faut s’y habituer, il y aura parfois des passages difficiles mais il faut garder confiance en vous. Voilà, c’est votre job, même si c’est dur, il faut vous y habituer et Julien nous a préparés à cela. Mais pour la première au centre de formation, ça m’a directement mis dans le bain !!! »

Comment envisages-tu la suite de ta carrière ?

« On envisage toujours le meilleur. Je ne sais pas exactement comment ça va se passer, il me reste un an de contrat à Louvain. On ne sait pas de quoi sera fait l’avenir. Pour le moment, l’objectif c’est de donner le maximum et d’ici quelques années, ce sera de jouer à l’étranger ou pour une équipe du top. C’est d’avoir un rôle à jouer dans ce championnat voire dans un autre championnat. Mais le plus important c’est de garder les pieds sur terre et de ne pas se brûler. Etre patient, prendre les bonnes options et continuer à travailler. Ce n’est pas parce qu’on avance dans une carrière qu’il n’y a pas des choses que l’on peut corriger. Le tout est de ne pas s’arrêter car il y a des jeunes qui arrivent, des autres joueurs qui travaillent plus que vous. Certains commencent une carrière avec moins de talent mais qui, à force de travail, deviennent meilleurs que vous et ça, on ne peut pas l’accepter ! Bref, j’arriverai là où je dois arriver mais quoi qu’il arrive, je n’aurais pas de regrets car j’aurai tout donné. »